Une nuit blanche au Lac à la Truite, 6 octobre 1967

par Marcel Guay

mes garçons François et Pierre me rappelaient depuis plusieurs semaines que je leur avais promis d'aller passer une journée complète au lac à la truite et surtout, d'y coucher.


L'automne était arrivé et bien que la température était belle pour la saison, les nuits étaient devenues plutôt froides. Or, en surveillant pour choisir une belle journée, je crus voir la journée idéale. 
Notre camp était bien organisé et muni de tout le nécessaire au temps où nous le fréquentions souvent. Mais, avec les années, nous avions laissé beaucoup de choses s’épuiser.


Or j'avais pensé qu'il serait probablement sage d'ajouter au poêle à bois dont notre camp était équipé, une chaufferette «Coleman» dont j'avais si souvent vanté les mérites à mes clients du magasin.
Marcel Guay visite son chalet du lac à la truite en janvier 1942
La noirceur venue, tout le monde s'était endormi aussi rapidement que la lumière s'était éteinte ; le grand chef aussi. Mais voici qu'à peine la nuit commencée, je fus réveillé par le froid qui me gagnait. Avant de revenir à mon lit, je constate que la chaufferette laissait dégager une chaleur que je ne trouvais la moitié aussi réchauffante que celle que je laissais entrevoir dans mes arguments de vendeur. Nous avions un coffre dans lequel nous conservions des couvertures de catalogne et des couvre-lits à pointes que ma mère avait confectionnés bien des années auparavant. J'en sortis tout ce qui s'y trouvait et en recouvrir chacun des lits.
Au bout de quelques courtes heures, l'air était glacial. Ayant à peine sorti ma tête de sac, je constatai que la porte était grande ouverte. Un fort vent du nord s'y engouffrait (notre camp avait été bâti sur une pointe s'avançant dans le lac en direction d'une petite île et il était passablement élevé puisque les vagues venaient s'éteindre sous la galerie, le clapotis de l'eau servait à nous endormir).

Notre appareil Coleman s'est éteint en panne sèche. Et moi qui croyais que la réserve pouvait procurer 12 heures de service. Enfin, c'est ce que je me disais, mais peut-être m'en étais-je convaincu à force de le répéter aux clients.

Je fis le tour des sacs de couchage des enfants, mais j'étais préoccupé, car il me semblait que je ne voyais plus la masse de François sur son lit. Je m'approchai donc et me mis à fouiller, d'abord doucement puis y allant de plus en plus fortement, ne le trouvant toujours pas. J'étais devenu très inquiet et me demandais ce qu'il avait bien pu lui arriver. Je tâtais dans le sac, de plus en plus inquiet, tassai la couverture pour enfin découvrir une petite masse tout au fond du sac de couchage. Il s'y était blotti tout à fait au bout pour retrouver plus de chaleur.

Un son à jamais pour moi associe au Lac à la Truite, le chant du huard à collier

J'eus beau essayer de me rendormir, mais ce fut peine perdue. J'étais tout à fait prêt pour témoigner du lever du jour. Leur déjeuner enfilé, mes gaillards étaient tout en fait en forme pour prolonger leur séjour une autre journée, mais le paternel l'était beaucoup moins.

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