Son répertoire d'une quarantaine de contes lui venait en partie de son père Arthème Gagnon et de sa mère Démerise Tremblay. Maigre, nerveuse, les cheveux en broussailles, n’ayant presque plus de dents dans la bouche, elle s’animait dès les premières phrases de son récit qu’elle mimait de façon pittoresque et vivante. Très volubile, elle faisait parler ses personnages sur un ton doux ou emporté, au gré des aventures qu’elle évoquait. Voici un résumé de l'une d'un de ces contes, recueilli le 1er septembre 1954.
La jument qui crotte de l'argent
Un jeune homme pauvre se présente dans une ferme pour se faire engager.— je suis un garçon de sus un habitant, puis, il dit, je sais labourer, je sais herser, je sais faire toutes les ouvrages des habitants.
Une fois l'année passée, le fermier lui dit:
— Tiens, il dit, tu veux-tu, il dit, que je m'en vais te donner un œuf? Cet œuf-là, il dit, tu auras rien qu’à... le rouvrir de même, puis tu crieras : « pique-bourdon ! » En criant, il va se mettre à piquer.
Le garçon repasse à la même auberge. Pendant la nuit, le couple d'aubergistes s'empare de l'œuf et crie "pique-bourdon". Les deux supplient bientôt le jeune d'arrêter les piqûres.
— On va te donner ta... ta vieille jument blanche. Prends-la, puis va-t'en.
De retour chez lui, la jument a crotté de l’argent tant que la famille voulait. Toujours ils ont été heureux tout le temps de leur vie.