Le centenaire des Bergeronnes



Source : Film d'archive : Centenaire des Bergeronnes



Source : Centenaire des Bergeronnes, programme souvenir, 24 et 25 juin 1944 : 1844-1944

Le programme des fêtes était réparti sur deux jours. Les organisateurs avaient voulu faire coïncider la célébration du centenaire avec celle de la Saint-Jean-Baptiste à cause de leur caractère religieux et patriotique. Les deux fêtes se complétaient admirablement. Le matin du 24 juin, la paroisse était remplie de joie. Les maisons décorées avaient pris un air de fête. La population s'était levée tôt pour goûter la journée dans toute sa plénitude.

A 9 heures commençait une messe solennelle pour le jour de notre fête nationale. Le sermon de circonstance fut donné par M. l'abbé Victor Tremblay. Ce sermon portait sur la place du patriotisme dans la vie. Après la messe, M. l'abbé Joseph Thibault curé précisa l’esprit qui devait régner pendant les deux jours. Ce sont des fêtes de famille, dit-il, les visiteurs, vous qui êtes venus vers nous, prenez place à nos tables. Les portes de toutes les maisons sont largement ouvertes. Entrez, vous êtes chez vous. Dans l'après-midi, le Comité du centenaire invitait toute la population à un grand ralliement sur le terrain de l'église. On était venu d'un peu toutes les paroisses de la Côte-Nord. Le défilé de la Saint-Jean-Baptiste passa devant la foule. Des commentateurs installés devant les microphones expliquaient aux spectateurs la signification des tableaux à mesure qu'ils se déroulaient. Les 12 chars allégoriques représentaient :
  • l'arrivée du premier colon
  • la famille canadienne
  • la sainte Famille
  • la première chapelle du Père Laure. a Bon-Désir en 1823
  • la mise en conserve des bleuets
  • la croix du chemin
  • Saint-Jean-Baptist
  • le moulin du fondateur Thomas Simard
  • l'industrie locale de l'automobile
  • la famine heureuse et la famille malheureuse
  • le laboureur
Quand le cortège si évocateur et si vivant eut fini de défiler, la foule écouta quelques orateurs qui l'entretinrent de sujets patriotiques. Les discours alternaient avec les chants saguenéens exécutés par la chorale des Enfants de Marie. Au nombre des discours, nous tenons à mentionner celui de M. Laurent Brisson, maire du village des Bergeronnes.

La fête du soir comprenait la présentation d'un grand film sur la paroisse des Bergeronnes. Ce film, commencé il y a quelques années par M. l'abbé Thomas-Louis-Imbeault constitue une pièce artistique de haute valeur et un document historique irremplaçable. La vie d'une belle paroisse canadienne-française y apparait dans toute sa simplicité et toute sa grandeur.
  • Le film débute par une présentation générale des Bergeronnes.
  • Il nous mène ensuite aux champs pour nous, faire assister "aux foins".
  • Vient la série des industries locales: la culture des légumes, l'élevage des poulets, les coopérative, la cueillette et la mise en conserve des bleuets, le travail forestier, le service de transport aérien, la pêche au saumon, etc.
  • Il n'oublie pas la grande nature, si riche et si accueillante aux alentours des Bergeronnes: le majestueux fleuve Saint-Laurent, les paysages pittoresques, en montagnes. Dans ce pays heureux et paisible, la mort apporte cependant comme ailleurs sa note de tristesse. Dans le cimetière, au centre du village, les croix se dressent assez nombreuses.
  • Le film nous laisse voir une cérémonie religieuse qui s'y déroule le 2 novembre. La population prie pour le repos des bâtisseurs qui sont retournés à Dieu. Mais si des bâtisseurs sont morts, il en lève d’autres. Contre le cimetière il y a la revanche constante des berceaux. Les familles nombreuses perpétueront la vitalité française dans ce coin de pays.
  • Le film se termine sur un hommage à la vie: la richesse de la vie, la seule richesse, n’est pas dans les biens artificiels ou dans les mines souterraines. Elle réside dans cette multitude d'enfants, au souffle puissant qui défilent sous nos yeux.
Le lendemain, dimanche, centenaire proprement dit, c'est la fête du centenaire proprement dit. Dès 7 heures, dames de Sainte-Anne, Ligueurs, Enfants de Marie et le reste de la population viennent faire la communion générale. La grand-messe solennelle est célébrée à 9 h. 30. M l'abbé Amédée Gagnon, vicaire à Saint-Jérôme et seul prêtre séculier de la paroisse des Bergeronnes, donne un magnifique sermon Le célébrant à l'autel est un des deux Oblats fils de la paroisse, le R. P. Anatole Lessard qui a reçu il y a quelques jours l'onction sacerdotale. La cérémonie de l'après-midi se déroule près du Ruisseau-Chaud, sur le coteau dominant la baie de Bon-Désir, à quelques milles en aval du village des Bergeronnes. Jamais semble-t-il, pareille affluence de peuple s'est rencontrée dans un même endroit en cette paroisse.

La population bergeronnaise transportée là au complet par la bienveillance des automobilistes de l'endroit, assiste émue au dévoilement d'un splendide monument. Ce monument rappellera l'histoire lointaine des inconnus qui fréquentèrent ces lieux, de même que le site où fut construite la chapelle du Père Laure en 1723. La plaque qui porte l'inscription est en granit noir du Lac-Saint -Jean et l'inscription se lit comme suit: Près d'ici est l'anse de Bon-Désir (Pipounapi en langue indienne) où les Basques, de temps immémorial, puis les Français et les Indiens ont fait la chasse aux loups 1narins. Le Père Laure jésuite y a construit une chapelle en 1723. 
 
M. Arthur Gauthier, maire de la paroisse des Bergeronnes, dévoile le monument. Le dévoilement est suivi d'un discours par M. l'abbé Victor Tremblay, président de la Société Historique du Saguenay. M. l'abbé Tremblay fait l'historique des Bergeronnes. Grâce à des recherches incessantes, il a réussi à présenter à la population bergeronnaise, en ce jour du centenaire, l'histoire détaillée de la fondation de cette paroisse, et la suite des développements qui l'ont faite ce qu'elle est. Enfin, pour rattacher de manière tangible l'idée de la patrie bergeronnaise à celle de la grande patrie, on clôture les fêtes par la présentation du spectacle inoubliable qui marqua le centenaire de tout le Saguenay en 1938.

CONSEILS ACTUELS
  • Village
o Laurent Brisson, maire
o René Maltais, secrétaire
o Joseph Lavoie, conseiller
o Valmore Tremblay, conseiller
o Alexandre Gagnon, con. conseiller
o Barthélémy Tremblay, conseiller,
o Sylvia Savard, conseiller
  • Paroisse
o Arthur Gauthier, maire,
o Léon Jean, secrétaire
o Albert Simard, conseiller,
o Albani Gauthier, conseiller
o Albert Savard, conseiller
o Louis-Philippe Imbeau, conseiller
o Adélard Guignard, conseiller
o Albert Bouchard, conseiller
 
Les fêtes du centenaire des Bergeronnes se perpétueront dans la mémoire de tous ceux qui les ont vécues. Le spectacle était touchant de voir les religieuses, les religieux, dignes enfants de la parole, les fils dispersés dans toutes les parties su Canada, et même aux Etats-Unis, tous venus se retremper à la source d'un même passé vivant. Jeunes et vieux ont senti la force de la communauté familiale. Ils ont compris que cette force les avait faits; qu'elle avait trouvé son épanouissement dans le cadre de la paroisse canadienne-française, cette famille de familles, foyer de vertus et de valeurs spirituelles. Aux Bergeronnes, le culte de la famille nombreuse est toujours à l'honneur. Le clocher de l'église demeure le point supérieur du ralliement. Le curé est toujours l'homme de Dieu qui incarne la puissance supérieure. Fidèle à son passé, à l'Eglise et à Dieu, la population bergeronnaise demeure le témoignage vivant de l'immortelle famille canadienne-française.

Jean-Paul GAGNON 

Source: article Centenaire des Bergeronnes (extraits)
L’Alma Mater
Petit séminaire de Chicoutimi
Série 3, volume 2, numéro 1, 21 septembre 1944