Affichage des articles dont le libellé est circa 1950. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est circa 1950. Afficher tous les articles

Le lac à la Truite

par Marcel Guay

À bien y penser, c’est vrai que c’est un fameux beau lac. On disait à peu près un mille de long, deux petites îles, dont une était juste en face de notre chalet, bien boisée et l’autre entièrement de roc, avec seulement quelques petits pins, des arbres. Je les dirais presque miraculeux, parce qu'ils ont poussé à travers quelques fissures de rochers alors que l’on n’y trouvait pas de terre du tout. Chose curieuse, en quelques endroits, tout autour du lac, il y avait quelques-uns de ces arbres qui, je suis sûr, n’auraient jamais pris racine, plantés de main humaine.

Suite au transfert d’embarcation dans la passe du lac à la truite, on trouvait un phénomène bien spécial. Il y avait une importante pointe de rocher bien uni. Et, au niveau du lac, une petite grotte qui s’enfonçait assez profondément! Mais seulement l’entrée permettait d’y accéder debout, le toit s’effilait en diminuant.
Alice Guay, Adelard-Paul, Marcel Tremblay, Henri Larouche au chalet du Lac à la Truite
À l'île d’en bas, une courte distance séparait cet endroit de la rive, mais curieusement une pointe de rocher émergeait pour diviser encore cet espace d’à peine un arpent. Un autre phénomène curieux était ce qu’on appelait le banc de sable. Situé presque au milieu du lac et long d’une centaine de pieds par un peu moins en largeur, où l’on pouvait sortir de l’embarcation et marcher alors que l’eau nous arrivait à peine mi-jambes. Mais attention, l’eau devenait subitement très profonde où l’on pouvait pêcher à très grande distance. C’était un endroit magnifique pour y pratiquer l’art du lancer à la mouche.
Naturellement tout le terrain n’était pas de rocher, car le lac était bien entouré de bois. Plutôt jeune de pousse, parce que le territoire avait été pratiquement tout détruit par le feu. Dans les campagnes, autrefois, les habitants, pour activer la cueillette des bleuets, avaient la manie d’y mettre le feu à intervalles plus ou moins rapprochés. Faudrait ajouter que dans notre coin, alors que j’étais jeune, la cueillette des bleuets était une industrie importante. Beaucoup de familles y trouvaient là le moyen d’habiller, chausser et équiper tous les enfants en prévision des classes.
Curiosité
Le 21 mai 1883, l'arpenteur Elzéar Boivin décrivait ainsi les alentours du Lac à la Truite :

En même temps qu'une partie de la rivière à Bas-de-Soie, j'ai aussi relevé le lac Raymond et le lac à la Truite. Le lac Raymond n'est qu'un élargissement de la rivière à Bas-de-Soie. Le terrain est plat du côté nord du lac, et en une certaine étendue inondée à la crue des eaux. L'eau est saine et n'atteint en profondeur que douze à quinze pieds. Le lac à la Truite offre aussi une eau pure et saine. Les contours sont anguleux et bordés de collines. Comme son nom l'indique, le lac regorge de truite. La décharge du lac à la Truite, après avoir passé par une suite de petits étangs, vient se perdre dans le lac Raymond.

Mgr Gendron raconte Noël aux Bergeronnes

(Cliquer sur la flèche pour commencer la lecture)
Enregistrement de Mgr Gendron réalisé à l'automne 1972
[transcription]

Les plus beaux Noëls que j'ai passés, nécessairement,  sont les Noëls lorsque j'étais prêtre puis qu'on se préparait ici, aux Bergeronnes, il y avait un esprit de Noël formidable. La crèche n’était jamais trop grosse. On en est venu à faire une crèche qui avait presque les dimensions de tout le pan d'en  avant de l'église, toute une forêt, toute une crèche en vrai cèdre. Et puis un vrai Jésus qui venait de Bethléem, authentique. On est peut-être la seule paroisse d'ailleurs, dans la province de Québec, à avoir un Jésus comme ça qui a été obtenu de la custode de Jérusalem, le même Jésus, avec les mêmes dimensions, les mêmes proportions qui se trouve dans la grotte même de Bethléem.
Et dans ce temps-là, on avait deux chorales ici : la chorale des Bergeronettes conduite par Lucie Brisson et Cécile Simard puis la  chorale de Saint-Grégoire, conduite par Gabriel Fortin. Puis chacune préparait sa messe de minuit, puis chacun voulait avoir le plus de minutes disponibles à la messe.
Dans ce temps-là, on se préparait à Noël par des jeûnes, par des crèches que les enfants faisaient dans les écoles, par des sacrifices qu'ils avaient accumulés. Chacun consentait à faire quelque chose de son mieux, donner de son meilleur pour que Noël soit plus joyeux pour tous. Le Tiers-Ordre de Saint-François s'occupait des pauvres et puis la ligue du Sacré-Cœur s'occupait de l'ornementation, aujourd'hui c'est la jeune chambre.
Les cultivateurs de plus loin, nos vieux, monsieur Johny Boulianne, monsieur Alfred Gagnon ou bien d'autres allaient chercher les plus beaux arbres au loin dans la forêt. Chez monsieur André Gagnon allait chercher longtemps d'avance, en octobre, de la mousse, des petits arbrisseaux, tout ce qui fleurit sur les rochers, puis ils gardaient ça à l'humidité pendant un mois ou deux pour qu'à Noël, on ait réellement des rochers ornés comme des véritables rochers. C'était quelque chose, l'esprit de Noël.
Tous les enfants arrivaient et arrivent encore d'ailleurs de loin pour se réunir avec leur papa puis leur maman en disant toujours: "On y retourne encore, on revient encore, on aime tellement nos parents, on a tellement peur dans le fond de nous autres, que ce soit le dernier Noël qu'on les ait tous les deux".
Je vous assure qu'on était content de braver le mauvais temps, braver les difficultés pour venir parce qu'il fallait à ce moment-là prendre le train à trois heures l'avant-veille à Québec, débarquer à La Malbaie à huit heures et demie du soir environ, coucher à La Malbaie, prendre le lendemain matin le snowmobile vers les neuf heures, puis il fallait à tout prix arriver avant trois heures à Baie-Sainte-Catherine afin de traverser, parce qu'il y avait une seule traverse dans l'après-midi. Les gens faisaient 90 milles de snowmobile pour venir voir leurs vieux parents. Puis y se trouvaient heureux parce que les anciens, comme l'abbé Amédée Gagnon, le docteur Gagnon, le docteur Lessard, me disaient qu’eux, ils restaient toujours à Chicoutimi pour Noël. Ils n’étaient pas capables de venir: pas de chemins puis il n'y a avait pas de ligne, seulement sur la grande route.
Ah, il fallait voir le plaisir que les gens avaient de se promener comme ça, les familles qui arrivaient à l’église avec leur carriole puis qu'il fallait dételer. Monsieur Pierre Hervieux qui dételait les chevaux, un peu plus tard, ç’a été en arrière de chez Monsieur Hormidas Lapointe, je pense qu’on dételait les chevaux.

Adeste Fideles chanté par mon oncle Welleston Bouchard en l'église Notre-Dame-de-Bon-Désir (1972)

Curiosité
Selon le Rapport sur les missions du diocèse de Québec et autres missions qui en ont ci-devant fait partie, publié en mai 1870, la première messe de Noël aux Bergeronnes s'est dite dans la chapelle de Sainte-Zoé en 1869.

Sources